Dans le monorail qui relie l'aéroport de Haneda au centre de Tokyo, un petit garçon me fait face, assis sur une grosse valise métallique entre son papa et sa maman. Ils sont beaux tous les trois. Tout sourire, il m'écoute lui dire les tout premiers mots que j'ose en japonais : あなたはかわいいです! Tu es mignon ! Ses parents sont contents. Je lui demande son prénom. Il s'appelle Wataru. C'est doux à prononcer Wataru, avec ce "r" qui ressemble bien davantage à un "l". Wataru a quatre ans. Il habite le nord du Japon. Avant la rentrée des classes, il vient passer quelques jours à Tokyo. Peut-être chez de la famille ou des amis. Ses parents ont pris quelques sacs avec des cadeaux dans leurs bagages. Le train ralentit. Hamamatsucho Station en approche. Je vais descendre là et prendre une autre ligne. Wataru me sourit encore et me lance : なんさいですか?Quel âge as-tu ? Comme j'ai bien révisé, je réussis à lui dire que j'ai 70 ans. Encore une petite demi-heure de trajet et j'arriverai à Ueno Station. Il est 20 heures. 7 de moins en France. Plus d'un jour plein de voyage. Un peu décalé mais hâte de me retrouver au grand air dans Tokyo où je n'étais plus retourné depuis douze ans. (à suivre)
Je me pince encore, oui. C’est que je n’en suis pas encore revenu de la nouvelle apprise hier-soir peu avant le Motchus de minuit. Le mot Gâté, ée vient de faire son entrée dans le nouveau dictionnaire 2026. Pas n’importe lequel, non. Pas celui bien moisi de l’Académie française, non. Gâté, ée figure désormais dans le Petit Robert, siouplé. Mon ami, notre ami Médéric Gasquet-Cyrus n’y est pas pour rien bien sûr. En sociolinguiste spécialiste entre autres du parler provençal et marseillais, il participe à la rédaction du Petit Robert et il est de longue à l’agachon sur l’évolution de notre langue, ses acccents, ses trésors, ses influences nouvelles, sur tout ce qui fait qu’elle s’enrichit, se transforme, et ainsi se transmet avec estrambord de génération en génération. Gâté, ée fait partie de ces mots familiers avec lesquels nous autres Marseillais exprimons notre amour ou notre affection à nos proches. Autre immense surprise hier-soir. Pour illustrer Gâté, ée, dans le nouveau Petit Robert 2026 – oui, vous avez bien lu – Médé a choisi cette citation :
Incroyable ! Médéric est allé trouver une phrase extraite de Du miel au bout des doigts, l’une des 13 nouvelles noires publiées en 2013 dans mon recueil Marseille rouge sangs. Ma gratitude est immense, surtout au nom de mon père, Paul James Schulthess, qui était un grand amoureux des dictionnaires et des citations. Il aurait été tellement fier de découvrir celle-ci, accompagnant ce mot qu’il utilisait parfois dans le sens de « faire gâté », faire un câlin. Mon papa fut instituteur de la République, dans notre quartier d’Endoume à Marseille. J’ai la chance de l’avoir enregistré me raconter qu’il avait bien failli ne jamais le devenir.
Médéric est aussi un homme de radio. Tous les matins, il propose une chronique sur Ici Provence : « Dites-le en marseillais ». C’est instructif, documenté, érudit et souvent très drôle. Bref, de la régalade.
Douze cents ! Y’a rien là ? En faisant mon Motchus hier-soir peu après minuit, j’ai réalisé que c’était la douze centième fois que je m’adonnais à ce jeu de mots marseillais, tout comme un moulon de valables de par le monde et la planète entière. Alors, je me suis amusé à griffonner ce petit poème qui ressemble à pas grand chose mais qu’il me plaît de partager.
Oh fan, déjà douze cents
Douze cents Motchus à deviner À découvrir, à réviser Douze cents mots du parler d’ici Teintés de provençal ou d’italien, pardi
Oh fatche, déjà douze cents Douze cents motchus à goûter à voix haute Des mots qui rappellent l’enfance Des mots bijoux, des mots grossiers Des mots rares, des mots oubliés
Tè vé, déjà douze cents Douze cents Motchus à savourer Des mots à transmettre, à partager Des mots pour chaque jour célébrer Notre patrimoine marseillais
Aïoli sur vous, Denis, Médé Déjà douze cents jours que vous offrez Esquiche teston et rigolade Estraïques ou estramassade Merci beaucoup et siouplé N’arrêtez pas de nous faire Motchuser !
La musique qui accompagne les mots dans mon petit montage sonore, c’est l’intro de » Les Rivalités « , la première chanson du nouvel album de Chichi et Banane, les poètes musiciens de la Ciotat. Je ne sais s’ils jouent à Motchus, mais les mots, ils savent les faire chanter. Pas vrai ?
Par bonds secs et noirs – joyeux dès le matin, oui le merle basque
En transit à Donostia San Sebastian. Petit matin. Comme toujours, je suis en avance pour prendre mon bus. Passé le pont Maria Cristina, je flâne, je respire et je rêvasse tout près du fleuve Urumea d’où remonte l’odeur iodée de la mer qui n’est pas loin. Il a plu toute la nuit. Le long de l’allée, les jonquilles ont abdiqué mais pas le merle venu me saluer. Il sait que je l’écoute en lui souriant et ça lui plaît. Et vous ?
Déjà de retour – l’hiver griffé de vos cris chaque année plus tôt
Concerto pour violoncelle en Sol majeur RV 414 de Vivaldi, II. Largo · Christophe Coin au violoncelle, Il Giardino Armonico dirigé par Giovanni Antonini
Une apparition – comme un éclair rouge et noir la beauté cachée
Variations Rococo de Piotr Ilitch Tchaïkowsky – Santiago Cañón-Valencia, violoncelle, Orchestre Philharmonique de Saint Petersbourg, dirigé par Nikolai Alexeev